Assemblage de couleurs de sa flore généreuse, mise en scène surprenante de sa faune audacieuse, reliefs splendides aux perspectives verticalement contrastantes, qu'il est toujours enchanteur de s'aventurer, le temps d'un projet, au coeur du massif des Ecrins.
Le premier jour débuta par une longue marche d'approche afin de rejoindre le refuge du Pelvoux depuis Ailefroide. Les lacets défilent et filent sous une chaleur caniculaire et des sacs alourdis par le poids du matériel et des cordes. Mais même à petite allure, la régularité des pas fit, qu'en à peine trois heures, nous poussions les portes du fief de Damien, gardien de refuge atypique, d'une humeur aussi lumineuse que le joyau dont il a la charge.
Après une petite pause amplement méritée, nous avons investi les lieux d'une façon très généreuse. D'abord le hall d'entrée jonché de tout notre bazar "bling-bling", ensuite le dortoir, vingt-quatre couchages pour douze personnes, Byzance !! Puis, topos exigent, les becquets alentours pour des révisions studieuses sur les manipulations de corde en rappel. Répétition des gestes pour une synchronisation espérée quasi parfaite sur la longue course du lendemain.
Repas et repos du guerrier !
Les "guerriers" dorment en toutes circonstances dirions-nous, et bien, c'était sans compter sur le concerto pour toiture en tôles ondulées orchestré par un vent nocturne violent qui nous laisse présager une météo peu optimiste dans les heures à venir.
Nuit très courte... réveil à 3 heures, pour le moment disette de pluie, il fait doux. Petit déj. et à 4 heures nous remontons la sente escarpée pour atteindre les premiers névés. Les lucioles de nos frontales étincellent et rompent l'obscurité. La montage est calme, çà et là on perçoit le son des souffles qui s'accélèrent. L'effort de montée est constant, les crampons serpentent entre neige, dalles et éboulis de rochers. Timing parfait à 3229 mètres au niveau de la Bosse de Sialouze. La lumière du jour éclaire désormais la trace qui file jusqu'au pied du couloir Coolidge. En regardant évoluer plusieurs cordées déjà engagées dans sa remontée, force nous est de constater que son sommet est pris dans une épaisse brume incitée par des bourrasques de vent de plus en plus violentes.
"Orage"... ô désespoir... à 400 mètres de Puiseux, pointes avant dans le dévers, décision collégiale de revenir sur nos pas. Trop d'incertitudes sur l'évolution météo de la journée, alors que la configuration initiale de la course reste encore longue et exigeante. Sage décision saluée une heure plus tard par le gardien autour d'une boisson chaude.
La descente jusqu'aux voitures se fait non sans amertume, mais plus rien à regretter une fois arrivés au parking. La montagne sait se montrer capricieuse et ses sommets aujourd'hui, restent définitivement bouchés. Mais tout cela n'est que prétexte à l'acte II, on reviendra investir les loges à "jardin" pour une seconde représentation à rideaux ouverts dans ce somptueux décor montagnard...